Silence Inacceptable sur le Dossier COTRADIS
Il existe des situations où le silence n’est plus possible, même en y mettant toute la volonté. C’est le cas de l’emblématique dossier COTRADIS, un des fleurons de la logistique au Burkina Faso, mis à mal par des sociétés marocaines, à savoir Fenie Brosssette et la CBAO (toutes deux entreprises du giron royal au Maroc – AL MADA). Dans les lignes qui suivent, un journaliste burkinabé s’interroge sur le mépris du Maroc face au non-respect des engagements, malgré l’intervention de la diplomatie burkinabé.
La faute est flagrante, lourde et gravissime. Il y a eu falsification et maquillage de camions, entraînant la mort d’hommes et laissant des veuves et des orphelins. Le préjudice économique et social est simplement ahurissant : plus de trois cents emplois gâchés et plus d’un milliard de retombées fiscales annuelles perdues. Que de trop pour une entreprise en plein développement.
Pourquoi l’entreprise marocaine refuse-t-elle d’exécuter la décision de la justice ?
Une décision de justice a été rendue, que l’entreprise et le Maroc refusent d’exécuter, afin de protéger des emplois et de continuer la productivité, contrairement à la société burkinabé qui, elle, n’a pas fauté. L’entreprise refuse de se présenter à la convocation du juge pénal. Les veuves et les orphelins doivent se débrouiller. Malgré les sit-in devant l’ambassade du Maroc, la partie marocaine n’a toujours pas indemnisé les victimes.
Une entreprise burkinabé pourrait-elle agir de la sorte au Maroc sans être inquiétée ?
Il n’est pas rare d’observer des constructeurs de véhicules retirer ou rappeler du marché des véhicules ayant des anomalies identifiées et prises en charge. Les préjudices engendrés chez les clients sont indemnisés. Peugeot, Volvo et Volkswagen l’ont fait récemment sans complexe. Il en va de même dans l’aviation : récemment, le constructeur Boeing, après deux accidents d’avion du 737 MAX 8, a indemnisé la compagnie Ethiopian Airlines et les victimes des crashs à hauteur de 2,5 milliards de dollars, ainsi qu’une amende de 243,6 millions de dollars pour éviter un procès pénal. Pourquoi Fenie Brosssette se comporte-t-elle de la sorte malgré une condamnation ?
Une résistance de Fenie Brosssette Maroc malgré l’interpellation du ministre des Affaires étrangères
Les autorités du Burkina Faso, à travers l’humble et compétent ministre des Affaires étrangères, ont saisi officiellement le Maroc sur le sujet, comme cela transparait dans le compte rendu de sa mission au Maroc le 21 juin 2024. Deux mois après, les lignes semblent ne pas avoir bougé, alors que, dans ce laps de temps, le Maroc a encore, à travers CIMAF, déposé la première pierre d’une usine, accompagnée des plus hautes autorités du Burkina. C’est le Maroc qui gagne encore, tandis que l’entreprise burkinabé doit attendre, espérant depuis cinq ans une indemnisation. Pourquoi un tel mépris en pleine révolution burkinabé ?
On se rappelle qu’une forte mobilisation de la jeunesse burkinabé, incluant la veille citoyenne des Wayignans, s’était déportée devant l’ambassade du Maroc. Malgré tout, le silence règne du côté du royaume chérifien. Nous pensons que le gouvernement burkinabé gagnerait à prendre ce dossier très au sérieux pour éviter que de telles situations ne se reproduisent au Burkina Faso. Nous estimons que les faits sont tellement graves que le président du Faso devrait s’investir pour que la partie marocaine respecte l’interpellation du Burkina.
Tout ceci se passe dans un Burkina nouveau où la souveraineté est désormais non négociable. Cette souveraineté se serait-elle arrêtée ou émoussée aux portes du Maroc ?
Le Burkina de Thomas Sankara accepterait-il une injustice faite à des citoyens du pays des hommes intègres ?
Gérard BEOGO