Quand tout reviendra à la normale, que deviendront ceux qui sont nommés pour casser la chaîne de commandement dans l’armée ?

J’ai lu comme tous les autres Burkinabè les décrets de nomination des jeunes capitaines à des postes de commandement de plusieurs groupements de l’armée. Ces nominations qui sont toutes logiques vu le grade du tenant actuel du pouvoir d’état, me laissent perplexe.  J’imagine que le pouvoir militaire prendra fin d’ici fin juillet 2024, et que le Burkina Faso retrouvera sa vie normale. 

En nommant des capitaines à certains postes de commandement, (je ne suis pas soldat, je ne suis qu’un simple analyste), cela casse la chaîne de commandement. On demande à des personnes formées pour le combat de planifier des stratégies de combats, ce qu’ils n’ont pas encore appris.

Nous le savons tous, être bon joueur et avoir tous les palmarès de ce monde dans le jeu est une chose, et entraîner ou coacher une équipe, une toute autre. Cela exige des aptitudes et des compétences particulières. Les jeunes officiers sont de valeureux combattants, je n’en doute point. Et, c’est pour cela qu’ils ont pu, grâce aux armes que le contribuable a mises à leurs dispositions pour le défendre, prendre le pouvoir par la force. Mais, il leur manque encore la science de la guerre, car la guerre, ce n’est pas seulement le combat. Et, tout le monde le sait. 

Le constat dans les nominations actuelles est que plusieurs officiers supérieurs sont mis sur le banc de touche depuis un certain temps. Ils se tournent les pouces dans leurs salons, regardant, comme les citoyens lambda, l’évolution de la situation sécuritaire du pays. Pour leur honneur et pour ne pas être comptables de ce qui se passe, plusieurs d’entre eux attendent sagement la fin de la transition pour reprendre du service. Aujourd’hui, il faudrait avoir le courage de le dire, « LA CHAINE DE COMMANDEMENT EST CASSÉE ». 

Comment ses jeunes capitaines feront pour commander leurs supérieurs?

Je ne vois pas un Commandant, un colonel, un lieutenant colonel ou tout autre officier supérieur, donc un plus gradé qu’un capitaine, accepter de se faire commander par un capitaine. Dans l’armée, c’est la discipline et dès que la discipline n’est plus respectée dans la grande muette, c’est le désordre et cela se fait déjà ressentir sur le terrain. La population est divisée au point où des Maliens se pavanent tous les jours au Burkina en donneurs de leçons et organisent des marches sous nos cieux. 

Le désordre est tellement ressenti que toute la classe politique et les analystes qui faisaient vivre la société se sont tus pour ne plus se faire insulter par des gens dont la devise est :  « INSULTER POUR SE FAIRE ENTENDRE. ». Malheureusement et fort malheureusement, le pays est devenu ainsi. Il suffit de sortir des grandes villes et d’échanger avec les populations martyrisées et victimes des grandes décisions de Ouagadougou, pour comprendre que non seulement les résultats que l’on attendait, tardent à venir, mais aussi que l’on n’a pas l’impression que tout était mis en œuvre pour soulager la peine des Burkinabè. “Au moins sous les régimes précédents, nos souffrances étaient moindres” m’a confié un habitant de Dori. 

Personnellement, je ne le comprenais pas aussi. Aujourd’hui, je mesure que nos choix de négocier ou de ne pas négocier, sont tels que nous condamnons certains de nos frères à des peines très lourdes, les obligeants à vivre comme des sous-hommes jusqu’à manquer de tout, même de l’essentiel, juste pour l’orgueil d’un homme. Les populations des provinces de la Tapoa et de la Kompienga n’en diront pas le contraire.

Avons-nous pensé à eux avant de prendre nos décisions ?

Je ne le pense pas. On peut vouloir les aider, mais quand nos choix pour les aider causent plus de préjudices que ne leur fait du bien, sachons raisons garder. Ce que les capitaines ont comme connaissances et compétences aujourd’hui, les officiers supérieurs les ont eues bien avant. Ils ont plus d’expériences et peuvent mobiliser plus de compétences autours d’eux, au regard de leurs statuts. À la fin de cette guerre, que deviendront ces jeunes capitaines que l’on utilise aujourd’hui pour casser la chaîne de commandement ? Accepteront-ils de redescendre à la base pour recevoir les ordres de ceux-là qu’ils ont écartés un temps ? Ne serons-nous pas dans un second conflit ?

Un adage de chez nous dit que « L’enfant qui se presse pour occuper la place de l’aîné se fait toujours ridiculiser.« . Ce pays est un bien commun. Nous l’aimons tous. Nos divergences constituent notre force. Et, si on essayait de le construire ensemble avec toutes les composantes ?

Van Marcel OUOBA

Journaliste – Analyste

2 réflexions sur “Quand tout reviendra à la normale, que deviendront ceux qui sont nommés pour casser la chaîne de commandement dans l’armée ?

  • 3 juillet 2023 à 11 h 59 min
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    N’est-ce pas mieux de s’informer davantage avant de prendre position? Etes-vous sûr qu’il y aura des militaires de rang supérieur dans les groupements armés qu’ils ont pris le commandement? Par ailleurs, cee sont des nominations et comme leur nom l’indique, elles sont discrétionnaires. Dès lors, si le pouvoir militaire prend fin, les capitaines nommés peuvent être déchargés de leurs postes. NON? C’est mieux que l’on abandonne nos imaginations pour ses rendre à l’évidence de la réalité.

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  • 10 juillet 2023 à 17 h 46 min
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    et un autre adage dit: les enfants savent courir mais ne savent pas ou se cacher.
    ce n’est plus loin.

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