Quand la religion reprend sa voix contre la haine
Enfin. Enfin une voix s’élève, forte, lucide et responsable, au cœur du tumulte. Dans un Burkina Faso brisé par les conflits, les divisions et les haines savamment entretenues, la Fédération des associations islamiques du Burkina (FAIB) vient de faire ce que l’on attendait depuis longtemps : prendre position, clairement, courageusement.
Par la remise d’un guide sur le discours alternatif aux autorités, la FAIB ne se contente pas de produire un document de plus à classer dans les tiroirs ministériels. Elle se positionne comme un rempart moral, une balise dans l’obscurité, rappelant une vérité simple mais devenue inaudible : l’islam est une religion de paix. Et toute parole qui s’en écarte trahit ses fondements.
Trop longtemps, le silence a fait le jeu du mal
Il faut le dire sans détour : le silence de nombreux leaders religieux a permis à la haine de prospérer. Dans les prêches, sur les réseaux sociaux, dans les conversations de rue, des mots violents se sont infiltrés, banalisés, radicalisés. Des versets arrachés à leur contexte sont devenus des armes idéologiques. La religion, au lieu de rassembler, a parfois été utilisée pour diviser, exclure, justifier l’horreur.
Il fallait y mettre un terme. Et la FAIB l’a fait. Mieux encore : elle prend le risque de déplaire à ceux qui, sous couvert de piété, propagent l’intolérance. Elle trace une ligne rouge : on ne peut plus se réclamer de l’islam tout en semant la haine.
Le poids des mots dans un pays à vif
Dans un Burkina où plus de deux millions de personnes sont déplacées, où des centaines de localités ont été vidées de leurs habitants, où la parole devient parfois aussi meurtrière que les armes, ce guide est une déclaration de guerre à la manipulation religieuse. Il est aussi un outil de reconquête de l’espace moral, un appel à la responsabilité citoyenne.
Car la foi ne peut pas être un refuge de la lâcheté. Elle doit être un levier de réconciliation, un ferment de cohésion, un pont au-dessus des fractures. C’est là tout le sens du geste de la FAIB. Et c’est pourquoi il doit être salué, diffusé, soutenu.
Un appel lancé à toutes les confessions
Cet engagement ne concerne pas que les musulmans. Il interpelle toutes les voix religieuses du pays, toutes confessions confondues. Dans cette guerre qui n’est pas que militaire mais aussi culturelle et spirituelle, chaque leader religieux, chaque pasteur, chaque prêtre, chaque imam, porte une part de responsabilité.
Car ce n’est pas seulement la sécurité qu’il faut restaurer, c’est aussi le lien social, le respect mutuel, la dignité de l’autre. Et cela commence par les mots que l’on choisit de dire ou de taire.
Refuser la neutralité dans un pays en danger
La FAIB vient de nous montrer que la neutralité n’est plus une option. Face aux discours de haine, il faut une parole forte, construite, éclairée, assumée. Une parole qui réconcilie. Une parole qui guérit.
C’est cette parole-là qui sauvera le Burkina, bien plus sûrement que les armes seules.
Van Marcel OUOBA, Gulmu Info