Fada : Octobre Rose, la bataille contre le silence et le cancer
Dans la cour du Centre médical urbain (CMU) Fada 1, des femmes patientent, parfois un peu inquiètes, parfois souriantes, devant la clinique mobile du CHRU de Fada. Ce mercredi matin, la campagne Octobre Rose a été officiellement lancée dans la capitale de l’Est. Dans un pays où la santé des femmes reste encore trop souvent reléguée au second plan, l’événement se veut un cri d’alerte : le dépistage précoce sauve des vies.
Le directeur général du CHRU, entouré de son équipe médicale, n’a pas mâché ses mots :
« Détecter tôt le cancer du sein, c’est sauver des vies », a-t-il martelé, en saluant le travail des agents de santé mobilisés pour aller au-devant des patientes.
Des tabous encore lourds
Dans les quartiers de Fada comme ailleurs au Burkina, parler de cancer du sein reste difficile. La maladie est souvent entourée de silences, de peurs, parfois même de croyances mystiques. Beaucoup de femmes hésitent encore à se faire examiner, redoutant le regard des autres ou le coût des soins.
« J’avais peur de venir », confie Awa, 34 ans, mère de trois enfants. « Mais une amie m’a dit que c’était gratuit, alors j’ai décidé de tenter. On ne sait jamais. »
Une campagne pour briser le silence
Tout au long du mois, le CHRU de Fada et ses partenaires mèneront des séances de dépistage, mais aussi des causeries, des émissions radios et des rencontres dans les villages. Objectif : démocratiser l’accès au diagnostic et surtout convaincre les femmes qu’un dépistage régulier n’est pas une perte de temps mais un acte vital.
La mobilisation touche aussi les hommes, souvent décideurs au sein des foyers. « Convaincre les maris de laisser leurs épouses se faire dépister est un combat en soi », glisse une infirmière.
Au-delà de l’événement : un combat sociétal
Si Octobre Rose s’impose désormais comme un rituel annuel, les soignants insistent : il ne doit pas se réduire à un mois de slogans et de foulards roses. Dans une région déjà fragilisée par l’insécurité et les déplacements forcés, la santé des femmes est une question de survie collective.
« Le cancer du sein n’attend pas le mois d’octobre pour frapper », rappelle un médecin du CHRU. « Notre défi, c’est de faire en sorte que chaque femme, en ville comme en campagne, sache qu’elle a le droit à la prévention et aux soins. »
Un appel à la solidarité
Derrière les discours et les chiffres, Octobre Rose reste une affaire de solidarité. Entre voisines qui s’encouragent à aller se faire dépister. Entre agents de santé qui redoublent d’efforts pour couvrir des zones rurales difficiles d’accès. Entre associations qui multiplient les actions pour lever les tabous.
À Fada, le mois d’octobre s’annonce donc rose, mais aussi exigeant. Car au-delà des rubans et des slogans, il s’agit d’un combat de longue haleine : donner aux femmes la possibilité de vivre, dignement, sans être vaincues par le silence ni par la maladie.
Issa THIOMBIANO, Gulmu Info