Enquête : Comment la mairie de Fada a multiplié par cinq ses recettes fiscales en 2024
Alors que la région de l’Est du Burkina Faso fait face à une insécurité persistante et à des restrictions budgétaires, la mairie de Fada N’Gourma a réussi un exploit remarquable dans un secteur bien précis : les recettes fiscales du marché à bétail ont été multipliées par cinq en 2024, passant de moins de 70 millions à plus de 350 millions de francs CFA. Soit une multiplication par cinq. Cette prouesse économique soulève de nombreuses questions : Quelles stratégies ont été mises en œuvre ? Quels leviers ont été activés pour produire un tel effet ? Et, surtout, cette dynamique est-elle durable ?
Une stratégie fondée sur la révision des prévisions et une meilleure anticipation
Dès le début de l’année 2024, la mairie de Fada a adopté une démarche pragmatique : fixer des prévisions budgétaires prudentes, en tenant compte des risques sécuritaires pesant sur la région. « Nous avons volontairement tablé sur un objectif modeste de 70 millions, au lieu des 200 millions des années précédentes, car la situation sécuritaire ne permettait pas d’être optimiste », explique un agent de la direction financière communale sous anonymat.
Mais la réalité du terrain s’est révélée moins sombre que prévu. Grâce à une reprise partielle des activités économiques dans les zones périphériques de la ville et un retour progressif des commerçants dans certains marchés secondaires, les rentrées fiscales ont connu un rebond inattendu.
Une hausse des taxes de plus de 400 % sur les transactions liées au bétail
L’élément déclencheur de cette hausse spectaculaire des recettes est un réaménagement en profondeur de la grille tarifaire applicable au marché à bétail de Fada N’Gourma. En 2024, la mairie a adopté un arrêté municipal instituant de nouvelles taxes et une augmentation drastique des montants existants. Les chiffres parlent d’eux-mêmes :
Type de bétail | Ancien tarif | Nouveau Tarif | |
Gros ruminants (bovins) | Taxe d’embarquement | 150 F CFA | 500 F CFA |
Taxe de stationnement | – | 500 FCFA | |
Petits ruminants (ovins, caprins) | Taxe d’embarquement | 80 F CFA | 200 F CFA |
Taxe de stationnement | 100 F CFA | 400 F CFA | |
Ânes | Taxe d’embarquement | 150 F CFA | 500 F CFA |
Taxe de stationnement | 100 F CFA | ||
Porcs | – | 500 FCFA | |
Volaille (par casier) | – | 1000 F CFA / Casier |
Comparées aux années précédentes où certaines taxes plafonnaient à 100 ou 150 F CFA, ces nouveaux taux représentent une augmentation de plus de 400 % dans certains cas. À cela s’ajoutent des taxes désormais appliquées à des animaux et produits qui échappaient jusqu’alors à tout prélèvement formel, comme la volaille ou les porcins.
Une hausse des taxes et une taxation systématique à l’entrée du marché
L’autre levier de la hausse exceptionnelle des recettes fiscales du marché à bétail réside dans le changement fondamental dans le mode de perception. Désormais, tous les animaux qui accèdent au marché sont systématiquement taxés, qu’ils soient vendus ou non.
Autrefois, seuls les animaux achetés faisaient l’objet d’une taxation. Ce système permettait à de nombreux commerçants d’échapper partiellement ou totalement à l’impôt. Désormais, toute tête de bétail introduite dans l’enceinte du marché est immédiatement assujettie aux deux taxes : l’embarquement et le stationnement, peu importe l’issue commerciale.
« Cette mesure a permis d’élargir considérablement la base de recouvrement. Avant, on n’encaissait que si l’animal était vendu. Aujourd’hui, même les animaux invendus sont enregistrés et taxés dès leur entrée », explique un agent du marché à bétail.
Cette taxation systématique a contribué à une hausse directe de plus de 400 % des recettes générées par le marché, tout en imposant une discipline nouvelle parmi les opérateurs du secteur.
Une performance structurelle, pas une réparation d’un passé mal géré
Depuis l’annonce officielle des recettes record du marché à bétail, certains commentaires sur les réseaux sociaux et dans l’espace public ont laissé entendre que cette hausse serait la preuve de détournements massifs opérés par les précédents conseils municipaux ou d’une mauvaise gouvernance chronique. Mais une lecture attentive des faits montre qu’il n’en est rien.
En réalité, la multiplication par cinq des recettes repose sur une réforme profonde de la politique fiscale locale, initiée en 2023. L’introduction de nouvelles taxes ciblées, l’augmentation significative des montants (jusqu’à 400 %) et surtout la taxation automatique de tous les animaux entrant sur le marché, vendus ou non, sont autant de mesures qui n’existaient pas auparavant. Sous les mandats précédents, la perception fiscale ne s’appliquait qu’aux animaux effectivement vendus, ce qui limitait naturellement les recettes.
Un acheteur de bétail clarifie : « Ce n’est pas qu’il y avait des détournements avant. C’est le système même qui était différent. Aujourd’hui, même un éleveur qui vient avec ses animaux et repart sans rien vendre paie les taxes. Ce n’était pas le cas auparavant. »
Ainsi, l’explosion des recettes n’est pas le fruit d’une meilleure surveillance des caisses, mais d’un changement fondamental dans le mode de collecte, décidé par les autorités actuelles dans un contexte de crise économique. Il s’agit donc d’une amélioration de la stratégie de gestion fiscale, et non de la découverte d’un gouffre financier laissé par les anciens gestionnaires.
Cette expérience prouve qu’en matière de finances locales, le levier ne réside pas seulement dans la lutte contre la corruption, mais aussi, et surtout, dans l’intelligence des réformes et la modernisation de la gestion.
Reste à voir si cette dynamique pourra être élargie à d’autres marchés et secteurs de la commune, et si les retombées économiques de cette manne fiscale seront perceptibles pour les citoyens, en termes de services publics, d’infrastructures et de mieux-vivre. Car c’est là que se jouera la véritable légitimité de cette performance : dans sa capacité à transformer des chiffres en progrès visible.
Van Marcel OUOBA, Gulmu Info
Ok c’est bien que les recettes soit en hausse de manière vertigineuse, mais malgré cette entré d’argent, quelle sont les actions que la mairie a entrepris pour l’embellissement de la ville de Fada? Parce que c’est bon de dire que les recettes ont été multipliés, mais ils est bon aussi qu’on voit ce que la mairie fait de concret pour la ville