À Fada, la lutte contre la corruption humanitaire passe par l’engagement citoyen
Le jeudi 10 juillet 2025, le centre EE/SIM de Fada N’Gourma a accueilli une conférence majeure autour d’un sujet trop souvent relégué au second plan : la corruption dans l’action humanitaire. Organisée par le Comité régional anti-corruption de l’Est (CRAC Est), démembrement du Réseau national de lutte anti-corruption (RENLAC), cette rencontre s’inscrivait dans le cadre de la 20e édition des Journées Nationales de Refus de la Corruption, couplées aux 9e Journées Africaines de Lutte contre la Corruption.
Une urgence sociale dans un contexte de crise prolongée
Dans cette région éprouvée par les attaques armées, les déplacements massifs de populations et la précarité grandissante, la mauvaise gestion des aides peut avoir des conséquences dramatiques. Et c’est justement pour replacer l’intégrité au cœur des efforts humanitaires que les organisateurs ont choisi de donner la parole aux citoyens. « L’intégrité ne doit pas être une option, mais une norme de vie »
Maître Ouattara Yaya, magistrat et juge d’instruction au Tribunal de Grande Instance de Fada, a animé les échanges avec une question directe : Quelle contribution citoyenne pour contrer la corruption dans les actions humanitaires ?
À travers une intervention à la fois pédagogique et engagée, il a rappelé que la lutte contre la corruption ne peut être efficace sans l’implication des communautés concernées :
Le juge a appelé à une mobilisation collective sur plusieurs axes
- Encourager une culture d’intégrité dans les pratiques quotidiennes ;
- Participer activement au contrôle citoyen de l’aide humanitaire ;
- Signaler les abus via les plateformes sécurisées du RENLAC ;
- Renforcer les cellules locales de vigilance ;
- Sensibiliser les populations déplacées à leurs droits
CRAC Est : vers une veille citoyenne structurée
À l’échelle régionale, le CRAC Est s’impose comme un acteur clé dans la sensibilisation et l’appui aux initiatives de surveillance locale. Selon M. Kouilga Kaboré, membre du comité d’organisation, l’objectif est clair :« Faire en sorte que chaque citoyen, même déplacé, se sente légitime pour défendre l’intérêt général ». Des outils de signalement confidentiels, des formations à la veille communautaire, et un accompagnement juridique sont progressivement mis en place pour protéger les lanceurs d’alerte et encourager une participation plus active.

Une transparence au service de l’espoir
Dans une région où l’humanitaire n’est plus un choix mais une nécessité, restaurer la confiance dans les circuits d’aide devient un impératif. La conférence de Fada aura permis de poser les bases d’une démarche collective, ancrée dans la responsabilité partagée entre les institutions et les communautés locales.
Le message est clair : les populations déplacées ne sont pas des assistés sans voix. Elles peuvent et doivent être actrices de leur propre protection. Dans un contexte de crise prolongée, cette dynamique citoyenne apparaît comme un rempart, mais aussi comme une source d’espoir.
Le RENLAC rappelle que tout citoyen peut signaler anonymement un cas de corruption via son numéro vert ou en se rendant au bureau régional à Fada N’Gourma. La lutte contre la corruption humanitaire n’est pas l’affaire des seuls experts. Dans chaque camp, chaque administration il y a des hommes et des femmes capables de dire non à l’injustice pour préserver ce qu’il reste de solidarité, de dignité et d’espoir.
Honorine MANO, Stagiaire, Gulmu info