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Pas de répit sous le soleil de Fada : les vacances des jeunes, entre débrouille et survie

L’école est finie, les classes sont désertes. Mais dans les rues de Fada, une autre forme d’apprentissage bat son plein : celle du travail, de la débrouille, de la survie. Pendant que certains enfants profitent du repos ou rendent visite à la famille dans les villes du Burkina, des centaines d’élèves, eux, retroussent leurs manches pour s’inscrire à l’école de la rue.

Raimatou Thiombiano, 16 ans, troque l’uniforme scolaire contre une tenue de marché. Elle aide sa sœur à vendre des vêtements au grand marché de Fada. « Elle me donne un peu d’argent, j’apprends aussi à commercer », raconte-t-elle, un panier de friperie à la main. Son objectif : économiser pour la rentrée prochaine, acheter cahiers, stylos, quelques habits. Une forme d’autonomie précoce, née de la nécessité.

Plus loin, dans un atelier de soudure chauffé à blanc, Mahamadou Touré, 12 ans, manie avec prudence les outils en métal. « Chaque année, pendant les vacances, mes parents m’amènent ici. Je veux apprendre un métier », dit-il, concentré, entre deux étincelles. Comme lui, ils sont des dizaines à investir les garages, les ateliers de couture, les kiosques de lavage ou les chantiers de construction.

Travail précoce ou apprentissage ?

Dans cette ville de l’Est burkinabè, le phénomène n’est pas nouveau. Il s’ancre dans une économie informelle omniprésente, dans des réalités sociales où chaque main compte. Certains encadreurs s’en félicitent. « Ces jeunes comprennent tôt la valeur du travail. C’est formateur. Ils ne traînent pas dans les rues à ne rien faire », affirme un commerçant de Fada.

Mais la frontière est ténue entre initiation professionnelle et exploitation. Des éducateurs tirent la sonnette d’alarme. « Quand les enfants manipulent des machines dangereuses, travaillent 10 heures par jour ou se lèvent à 5 heures pour aller vendre, ce n’est plus de l’apprentissage, c’est une mise en danger », déplore une agente de l’Action sociale de la région.

Le manque d’alternatives

Dans une ville où l’État peine à offrir des solutions éducatives de vacances, où les centres culturels manquent de ressources et où les associations ferment en été faute de financements, le travail devient souvent la seule occupation « utile ». Les initiatives restent rares : quelques associations proposent des activités ludo-éducatives, mais elles ne touchent qu’une infime partie des élèves.

Une génération résiliente, mais vulnérable

Les enfants travailleurs de Fada ne se plaignent pas. Ils s’adaptent, comme leurs aînés. Entre apprentissage d’un métier, soutien à la famille et quête de dignité, ils grandissent vite. Trop vite. Ils témoignent d’un pays où la jeunesse reste le moteur d’une économie de survie, mais aussi d’un système scolaire et social incapable, pour l’instant, d’offrir des vacances protégées.

À Fada N’Gourma, les vacances n’ont ni jeux ni répit. Elles ont le goût du goudron chaud, des mains calleuses, de l’effort silencieux. Et dans les regards des enfants travailleurs, un même message revient : il faut tenir, apprendre, s’en sortir. À tout prix.

Pélagie COMBARY, Stagiaire, Gulmu Info

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